Le Processeur : des origines jusqu'à la bascule des années 2000

Le CPU dans tous ses états 1/6

L’ENIAC, Electronic Numerical Integrator and Computer, a été mis au point durant la Seconde Guerre mondiale, à l’université de Pennsylvanie, par les Américains John P. ECKERT et John W. MAUCHLY. 

Il est considéré comme le premier ordinateur programmable électronique. Il était constitué de 17 468 tubes à vide, 7 200 diodes, 1 500 relais, 70 000 résistances et 10 000 condensateurs et occupait un volume total de 66m3 pour une masse totale de 30 tonnes. Côté alimentation, on parle d’une consommation de 150kW. 

Dans cette configuration, il disposait d’une puissance de calcul théorique de 50 000 instructions par seconde (IPS). Toutefois, l’utilisation des tubes à vide contraignait à une fiabilité toute relative, en effet, au risque de claquage desdits tubes par l’allumage ou l’arrêt de la machine, s’ajoutait celui de la combustion d’un insecte qui, attitré par la lumière, se serait malheureusement posé sur un tube : le bug informatique était né – c’est là son origine.

ET LE TRANSISTOR FUT

L’invention du transistor en 1947 a permis de révolutionner le secteur grâce notamment à une réduction de la taille et de la masse, une fiabilité améliorée et des tensions de fonctionnement beaucoup plus faibles. Le plus gros avantage est son fonctionnement instantané, comparativement aux tubes à vide qui nécessitaient un temps de chauffe de plusieurs secondes.

C’est en 1971 que le premier microprocesseur, dénommé 4004, est commercialisé par Intel. Travaillant sur 4 bits, il est basé sur une technologie de transistors dits Self-aligned gates. Constitué de 2 300 transistors gravés1 en 10µm (soit 0,01mm) il occupe une surface de seulement 12mm², pour quelques grammes, et nécessite une tension de 15V. Il est encapsulé dans un boitier DIP 16 broches dont le TDP (Thermal Design Power – simplifions : dissipation thermique) avoisine 1W. Avec sa fréquence de fonctionnement de 740kHz, il dispose d’une puissance de calcul théorique de 92 000 instructions par seconde, c’est-à-dire, peu ou prou le double de celle de l’ENIAC sorti quelques décennies avant lui et cela pour environ $200 de l’époque.

UNE NOUVELLE ARCHITECTURE​

C’est en 1978, qu’Intel sort le 8086 qui va poser les bases de l’architecture x86 (toujours du Von Neumann). Ce processeur fonctionne sur 16 bits, gère 1 Mo de mémoire, dispose de 29 000 transistors gravés en 3µm sur une surface de 33mm² et nécessite 5V pour son fonctionnement. Sa fréquence de fonctionnement est variable, entre 4,77MHz et 10MHz, ce qui lui permet d’effectuer de 330 000 à 750 000 instructions par seconde et cela pour $360.

Sept ans après, en 1985, Intel sort son 80 386. C’est le premier processeur compatible 32 bits et capable de gérer 4 Go de mémoire. Il est animé par 275 000 transistors gravés en 1µm sur une surface de 104mm². Il est alimenté en 5V avec une consommation moyenne de 2W. Sa fréquence de fonctionnement de 16 à 33MHz lui permet d’avoir une capacité de calcul proche des 2,15 millions d’instructions par seconde (MIPS) à 16MHz. Ce processeur marque également le début des sockets PGA (matrice de pins). Prix : $420

l'épreuve du ghz

1999, marque l’avènement du premier processeur à passer la barre du GHz, le Pentium III d’Intel. 

C’est un processeur qui dispose de 28,1 millions de transistors gravés en 130nm (0,00013mm) sur une surface d’environ 100mm². Il a une tension d’alimentation moyenne de 1,5V pour une consommation de 27,6 à 33,9W. Durant cette période, une nouvelle unité de mesure a été ajoutée en plus des MIPS, il s’agit des FLOPS2 qualifiant les opérations sur les nombres en virgule flottante. Ces deux « unités » ne sont pas comparables, et ce sont les FLOPS qui prendront l’ascendant comme référence, car plus pertinents pour suivre les évolutions à venir. Un pentium III 733MHz c’est 1 203 MIPS et 7 300 MFLOPS (soit 7,3 milliards de calculs en virgule flottante par seconde). Et le prix ? Le Pentium 3 – 800MHz vaut $851.

Le Pentium 4 (nom de code Prescott) qui sort en 2004 est la dernière grosse évolution du CPU traditionnel tel qu’on le conçoit. 

Sa fréquence de fonctionnement atteint 3,8 GHz (alors qu’Intel planifiait les 10 GHz). Il possède 125 millions de transistors gravés en 90nm sur une surface de 112mm². Alimenté en 1,425V, sa consommation moyenne de 84 à 115W a posé beaucoup de problèmes de refroidissement. 

Cette gamme de CPU a également introduit le socket LGA (Matrice de pastilles). Elle marquera aussi l’avènement de l’architecture 64 bits (Prescott-2M et Cedar Mill). Ce sont les derniers processeurs monocœurs.
Le modèle P4 extrême édition de 3,2 GHz à une puissance de calcul de 9 726 MIPS et de 105 051 MFLOPS. Chaque palier de fréquence se paie très cher, un P4 520J (2,8GHz) vaut $163, un P4 550J (3,4GHz) vaut $278 et le P4 570J (3,8GHz) vaut $637.

Vous aurez remarqué que cet article est centré sur Intel. Mais il existe un autre acteur incontournable : AMD. À l’origine, AMD fabriquait des clones x86, sous licences Intel, ceci jusqu’au début des années 1990 avec l’Am486. À l’apparition des Intel Pentiums, la société AMD est obligée de proposer son propre processeur dénommé le K5. C’est cette transition qui marque le début de la rivalité entre les deux constructeurs.

en résumé

Année

nom

Architecture

Nb transistors

taille

« Puissance » de calcul

Prix à l’époque

1945

ENIAC

Von Neumann

17 468 tubes à vide, 7 200 diodes, 1 500 relais, 70 000 résistances et 10 000 condensateurs

66 m3

50 000 IPS

$487 000 (7 Millions $ d’aujourd’hui)

1971

Intel 4004

Von Neumann

2 300

12 mm²

92 000 IPS

$200

1978

Intel 80 86

x86

29 000

33 mm²

750 000 IPS

$360

1989

Intel 80 386 DX

20 MHZ

x86 Intel

275 000

104 mm²

2,5 millions IPS (MIPS)

$299

1997

Intel Pentium Pro 

200 MHZ

x86 Intel

5,5 millions

196 mm²

350 MIPS

$2 675

2006

AMD Athlon 

fx – 60

x86 AMD-K8

233 millions

199 mm²

18 938 MIPS

$1 031

1 : La gravure correspond au moment où les composants sont « sculptés » par divers procédés (photolithographie, gravure chimique…). Attention, lorsque l’on parle de finesse de gravure, c’est bien le procédé de fabrication, et pas de la taille des composants (même s’ils sont étroitement liés).

2 : FLOPS : Floating Point Operations Per Second – voir notre article à ce sujet

3 : Le CPU (Central Processing Unit), également connu sous le nom de processeur, est une puce électronique complexe qui assure la gestion et l’exécution des instructions logiques et arithmétiques d’un système informatique. Il est considéré comme le cerveau de l’ordinateur et permet de traiter les données, d’effectuer des opérations complexes, de contrôler les périphériques et d’exécuter des programmes. Le CPU est composé de plusieurs éléments tels que l’unité de commande, l’unité arithmétique et logique, les registres et la mémoire cache, qui travaillent ensemble pour effectuer les tâches demandées.

Retrouvez la suite de l’histoire des CPU dans le prochain article !